Sept économistes d'Indeed provenant de partout dans le monde se prononcent sur les facteurs qui influent sur l'économie et le marché de l'emploi dans leurs régions ainsi que sur leurs prédictions quant à la possibilité d'un ralentissement.
Faits saillants
- Il est de plus en plus difficile pour les gouvernements et les entreprises de prendre des décisions importantes en raison des barrières tarifaires proposées qui créent de l'incertitude dans les pays du monde entier.
- L'incessante guerre en Ukraine encourage certains pays européens à investir dans la défense, ce qui peut stimuler l'innovation, mais peut détourner des ressources destinées aux services sociaux et à d'autres secteurs économiques.
- Certains marchés voient une lueur d'espoir, comme des investissements supplémentaires dans l'innovation et les infrastructures.
Partout dans le monde, les incertitudes économiques et géopolitiques alimentent les craintes de récession, c'est-à-dire une période prolongée de forte réduction des activités économiques, avec des baisses de la production et de l'emploi. Mais les perspectives varient considérablement d'un pays à l'autre, en fonction de facteurs comme la proximité d'un conflit et l'incidence potentielle des barrières tarifaires.
Dans cet article, sept économistes de l'Indeed Hiring Lab présents dans les principaux marchés mondiaux de l'emploi discutent des facteurs qui influencent leur économie, se prononcent sur la probabilité qu'ils soient confrontés à une récession cette année et trouvent même quelques points positifs.
Au Canada : Des barrières tarifaires élevées mèneraient à une récession
Brendon Bernard, économiste principal de l'Indeed Hiring Lab et spécialiste du marché de l'emploi au Canada
Depuis le début de 2025, l'économie et le marché de l'emploi canadiens sont véritablement somnambules en raison de l'incertitude entourant les barrières tarifaires.
La Banque du Canada n'a pas émis de prévisions dans son dernier rapport sur la politique monétaire. Au lieu de cela, elle a proposé deux scénarios, dont l'un suppose que les problèmes liés aux barrières tarifaires s'atténueront et que la croissance pourrait ralentir temporairement jusqu'à s'arrêter, mais que nous ne connaîtrions pas une véritable récession.
L'autre scénario suppose que les gouvernements américain et canadien vont de l'avant avec les barrières tarifaires proposées. Dans ce scénario, le Canada connaîtra une récession importante au milieu de l'année, ce qui aura des répercussions négatives sur les exportateurs, les importateurs et les consommateurs canadiens ainsi que sur le marché du travail canadien.
Les secteurs les plus exposés sont la fabrication et les ressources naturelles. La main-d'œuvre de ces secteurs est immédiatement menacée. Mais pour le moment, nous sommes toujours dans une situation d'attente et les offres d'emploi sur Indeed sont demeurées relativement stables.
De plus, l'incertitude actuelle incite les décideurs politiques à commencer à s'attaquer aux faiblesses de nos politiques économiques nationales, comme les règles compliquées qui ralentissent le commerce entre les provinces et qui pèsent sur l'économie depuis longtemps.
Aux États-Unis : Il existe encore la probabilité d'un atterrissage en douceur, mais tout dépend de la politique
Cory Stahle, économiste de l'Indeed Hiring Lab et spécialiste du marché de l'emploi aux États-Unis
Plus tôt cette année, il semblait que l'économie américaine allait réussir un atterrissage en douceur, mais la situation s'est plutôt dégradée. Les changements de politique, y compris les barrières tarifaires, les restrictions à l'immigration et la réduction de la main-d'œuvre fédérale, créent de l'incertitude sur le marché de l'emploi et l'économie en général, ce qui aura probablement une incidence sur tous les secteurs jusqu'à un certain degré.
Il est très difficile pour les entreprises de poursuivre leurs activités quotidiennes normalement.
Par exemple, le secteur des soins de santé a connu une forte croissance, mais les restrictions sur l'immigration pourraient limiter son bassin de main-d'œuvre.
Si les barrières tarifaires font grimper le coût des matières premières pour la fabrication, cela pourrait avoir une incidence sur les emplois dans ce secteur.
Les collèges, les cégeps et les universités perdent ou sont menacés de perdre des investissements fédéraux, ce qui n'augure rien de bon pour l'emploi dans les secteurs de l'éducation et de la recherche scientifique*. Dans un récent sondage d'Indeed mené par The Harris Poll, 52 % des répondants affirment que leur organisation se prépare à une récession et 46 % disent s'inquiéter des licenciements au cours de la prochaine année.
De janvier à février, nous avons constaté une augmentation de 50 points de pourcentage* du nombre de candidatures Indeed commencées par des travailleurs fédéraux dans des organismes examinés par le Department of Government Efficiency (DOGE). Nous avons également noté une légère hausse parmi tous les travailleurs fédéraux, quel que soit l'état de la révision du DOGE.
L'une des grandes questions concernant une récession potentielle est la suivante : Que fera la Réserve fédérale? En cas de récession, elle devra peut-être choisir entre freiner l'inflation et permettre aux gens de conserver leur emploi. Le plus gros souci est que nous pourrions nous retrouver avec une stagflation, une situation où les gens perdent leur emploi alors que l'inflation fait grimper le coût de la vie. Mais nous n'en sommes pas encore là. Il existe une vigueur résiduelle sur le marché de l'emploi ainsi qu'un potentiel d'atterrissage en douceur, même s'il se réduit rapidement. Je reste optimiste.
« Plus tôt cette année, il semblait que l'économie américaine allait réussir un atterrissage en douceur, mais la situation s'est plutôt dégradée. »– Cory Stahle, Économiste de l'Indeed Hiring Lab et spécialiste du marché de l'emploi aux États-Unis
Au Japon : Un ralentissement, oui; une récession, non
Yusuke Aoki, économiste de l'Indeed Hiring Lab et spécialiste du marché de l'emploi au Japon
Le Japon ne s'attend pas à une récession, mais nous anticipons un ralentissement. Le Fonds monétaire international a révisé sa prévision de croissance du PIB de 1,1 % à 0,6 %. Cette prévision s'explique en partie par la menace de barrières tarifaires, qui pèse lourdement sur le secteur manufacturier. L'indice des directeurs d'achats, qui mesure le sentiment dans le secteur manufacturier, a atteint 48,8 % en avril. Tout ce qui est inférieur à 50 % signale une contraction du secteur.
Le côté positif de la situation, c'est que le Japon est devenu moins dépendant des exportations et les taux d'exportation continuent de baisser.
Pendant ce temps, la croissance des salaires est forte. Au Japon, les entreprises négocient généralement les salaires au printemps. Cette année, nombre d'entre elles ont déjà terminé les négociations et se sont mises d'accord sur une augmentation d'environ 5,4 %, un record historique.
Cependant, certaines entreprises n'ont pas encore mené de négociations salariales annuelles. L'incertitude croissante peut les décourager d'augmenter les salaires, ce qui pourrait entraîner le mécontentement des employés. Ces employeurs devraient songer à d'autres moyens de fidéliser les travailleurs, comme l'amélioration des avantages.
Au Royaume-Uni : L'économie nationale a fait preuve de résilience face à la croissance du ralentissement
Jack Kennedy, économiste principal pour Indeed Hiring Lab et spécialiste du marché du travail au Royaume-Uni et en Irlande
Nous essayons présentement d'éviter une récession au Royaume-Uni, même si les perspectives de croissance se sont assombries. Notre économie n'est pas aussi dépendante des exportations manufacturières que d'autres, bien que certains secteurs, comme les produits pharmaceutiques et l'automobile, soient plus fortement exposés aux barrières tarifaires imposées par les États-Unis et qu'un contexte mondial plus faible nuira à la croissance dans son ensemble.
Malgré le ralentissement de l'économie, comme une augmentation importante des cotisations patronales obligatoires à la sécurité sociale, les données économiques du premier trimestre ont été meilleures que prévu. L'économie nationale a repris un peu d'élan, ce qui pourrait aider le marché de l'emploi à surmonter une partie des turbulences liées à l'incertitude de l'économie mondiale.
La confiance des entreprises a chuté en avril à la suite de la tourmente entourant les barrières tarifaires, mais les licenciements sont demeurés assez modestes au cours des derniers mois. À l'heure actuelle, les employeurs ne sont pas très optimistes quant à l'augmentation de leur main-d'œuvre, mais ils ne semblent pas non plus envisager de procéder à des compressions généralisées.
Néanmoins, il existe de nombreuses variables inconnues, dont la croissance des salaires. Celle-ci demeure élevée d'une année à l'autre au Royaume-Uni à près de 6 %, soit le double du taux enregistré aux États-Unis et en Europe. C'est une bonne chose pour les travailleurs, mais c'est certainement quelque chose que les décideurs politiques de la Banque d'Angleterre considèrent comme un signe de pression inflationniste. La croissance des salaires ralentit graduellement et, si elle se maintient, il serait plus facile pour la Banque de réduire les taux d'intérêt plus rapidement si l'économie a besoin d'un soutien supplémentaire plus tard dans l'année.
En Allemagne : La récession pourrait persister, mais les investissements dans les infrastructures sont encourageants
Virginia Sondergeld, économiste de l'Indeed Hiring Lab et spécialiste du marché de l'emploi en Allemagne
L'Allemagne est en récession depuis plusieurs années maintenant, en raison de facteurs comme la guerre en Ukraine, la hausse des prix de l'énergie et les problèmes persistants de la chaîne d'approvisionnement liés à la période COVID.
Il existe également des facteurs structurels qui freinent l'économie. Le gouvernement allemand n'a pas investi de manière substantielle dans les infrastructures depuis de nombreuses années.
Plus tôt cette année, le gouvernement et les instituts de recherche économique prévoyaient une croissance minimale entre 0,0 % et 0,3 %. Si les barrières tarifaires imposées par les États-Unis sont adoptées, la croissance chutera probablement jusqu'à 0,3 % et nous pourrions glisser vers une autre année de récession. Les barrières tarifaires seront particulièrement sévères pour des secteurs comme l'automobile et la machinerie industrielle. Le gouvernement allemand travaillera dur pour conclure un accord avec les États-Unis.
La bonne nouvelle, c'est que les politiques économiques nationales sont déjà en train de changer. En mars, le Parlement allemand nouvellement élu a autorisé 500 milliards d'euros d'investissements dans les infrastructures comme les ponts et les chemins de fer. Déjà, le cours des actions des entreprises de construction et de défense a augmenté. Le nouveau gouvernement encourage les nouvelles politiques qui visent à stimuler l'économie, comme la suppression de l'impôt sur les sociétés sur les investissements et la possibilité pour les retraités de gagner jusqu'à 2 000 € par mois en plus de leur retraite, non imposable, afin de maintenir le plus grand nombre possible de personnes sur le marché du travail.
En France : Aucune prédiction de récession, mais des inquiétudes concernant l'Ukraine
Alexandre Judes, économiste de l'Indeed Hiring Lab et spécialiste du marché de l'emploi en France
En France, nous sommes prudents, mais nous ne prévoyons pas encore de récession. La France n'est pas fortement dépendante des exportations, de sorte que les barrières tarifaires imposées par les États-Unis auront probablement des répercussions limitées et relatives au secteur, principalement l'aérospatiale, les produits de luxe et l'agriculture.
L'incertitude politique et la géopolitique européenne représentent les plus grandes préoccupations de l'économie française. Il existe une grande incertitude quant à savoir si la guerre en Ukraine s'étendra à des régions comme les pays baltes ou la Moldavie.
Bien que les gouvernements français aient augmenté leurs dépenses militaires depuis 2014, le gouvernement actuel fera probablement de nouveaux investissements dans le secteur de la défense en raison du risque géopolitique. Il faut par conséquent trouver de l'argent ailleurs et c'est là que les contraintes et les incertitudes politiques entrent en jeu. Les impôts sont déjà élevés et la réduction des avantages sociaux est très impopulaire. L'impasse qui en résulte exerce une pression sur la confiance des entreprises, ce qui a des répercussions sur les investissements en matière d'embauche.
En Australie : Le marché de l'emploi demeure vigoureux, même si des signes avant-coureurs de difficultés font leur apparition
Callam Pickering, économiste de l'Indeed Hiring Lab et spécialiste du marché de l'emploi en Australie
La probabilité d'une récession en Australie demeure plus faible que pour d'autres marchés. Le marché de l'emploi reste très vigoureux par rapport aux normes historiques, avec un taux de chômage de seulement 4,1 % et des offres d'emploi publiées sur Indeed s'inscrivant à 45 % au-dessus des niveaux d'avant la pandémie.
Il existe pourtant des signaux inquiétants. Au cours de la dernière année, l'économie australienne a progressé de 1,3 %, ce qui ne semble pas être un mauvais résultat si l'on considère que la croissance démographique a été de 1,8 %. Au prorata de la population, l'économie australienne s'est contractée au cours des deux dernières années et demie.
De plus, bien que les barrières tarifaires ne soient pas susceptibles d'avoir une incidence directe importante sur l'Australie, elles toucheront la Chine, le plus grand partenaire commercial de l'Australie. L'une des raisons de la réussite économique soutenue de l'Australie est notre proximité avec la Chine et notre aptitude à fournir les ressources dont elle a besoin pour son expansion économique, en particulier le minerai de fer et le charbon.
Bien que le secteur minier ne soit pas un grand employeur, ne représentant que 2,2 % des emplois en Australie, il s'agit d'un secteur très lucratif. L'année passée, environ 11,5 % des revenus d'entreprise et 41 % des résultats opérationnels provenaient du secteur minier. Si la demande en ressources ralentit, l'Australie s'appauvrit, ce qui aura des répercussions sur les emplois dans d'autres secteurs.
Ce qu'il faut retenir :
Il s'agit d'un moment d'attente pour la plupart des économies, alors que les répercussions des barrières tarifaires, des conflits et de l'évolution des politiques se font sentir. Cependant, une récession généralisée n'est pas une fatalité et une lueur d'espoir apparaît dans les pays qui se concentrent sur le renforcement des politiques économiques intérieures.
Les renseignements présentés dans cet article ne représentent pas une prévision, une prédiction ou toute autre indication du rendement futur du marché ou de l'économie et ne doivent pas être utilisés à ces fins.
* Contenu en anglais

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