En quoi consiste une structure d’entreprise alternative?
Une structure d’entreprise alternative est un cabinet d’avocats qui est partiellement dirigé et détenu par des non-avocats. Cela permet au cabinet d’intégrer des personnes qui peuvent apporter des compétences et une expérience supplémentaires. Ces personnes peuvent être un partenaire ou un directeur, ou participer à titre d’investisseurs. Voici quelques exemples de structures d’entreprise alternatives :
- Un avocat qui fonde un cabinet d’avocats avec un propriétaire ou un partenaire non avocat;
- Un gestionnaire non avocat dans un cabinet d’avocats établi, mais qui souhaite devenir un copropriétaire;
- Un cabinet appartenant à un avocat qui souhaite intégrer un partenaire non avocat.
Pourquoi les structures d’entreprise alternatives ont-elles posé problème?
Tout modèle d’affaires différent du partenariat standard ou de l’entreprise individuelle est considéré comme une alternative. Par exemple :
- Les partenariats multisectoriels : Les partenariats multisectoriels sont créés lorsqu’un ou plusieurs praticiens non-juristes s’associent à un ou plusieurs praticiens juristes. Ce partenariat peut fournir des services juridiques et non juridiques, par exemple un mélange de services juridiques et comptables à partir du même cabinet. L’Ontario, le Québec et la Colombie-Britannique sont présentement les seules provinces au Canada qui autorisent les partenariats multisectoriels et les pratiques juridiques incorporées.
- Les pratiques juridiques incorporées : Une société par actions est une entité distincte de son propriétaire. La combinaison d’activités professionnelles offre la possibilité d’accéder à l’épargne-retraite, aux allégements fiscaux, à la minimisation des gains en capital par la vente d’actions d’entreprises privées et à la protection contre les poursuites judiciaires. En Ontario, la Loi sur le Barreau et la Loi sur les sociétés par actions autorisent les techniciens juridiques autorisés et les avocats à fournir des services juridiques et à pratiquer le droit par l’intermédiaire d’un ordre professionnel.
Par le passé, une structure d’entreprise alternative n’était pas possible en raison de l’interdiction du partage des honoraires avec des non-avocats. Les autorités ont mis en place cette mesure dissuasive au cas où l’intérêt d’un non-avocat pour les honoraires compromettrait l’indépendance de l’avocat. L’interdiction du partage des honoraires garantit également que les non-avocats n’ont aucun intérêt financier en influençant la conduite de l’avocat dans le cadre d’un mandat ou d’un dossier.
Les avantages d’une structure d’entreprise alternative
Les structures d’entreprises alternatives peuvent éliminer de nombreux obstacles en lien avec la propriété ou le partenariat par des non-avocats d’organisations offrant des services juridiques, fournir de nouvelles occasions d’élargir l’accès à la justice et aux innovations et redéfinir les services juridiques dans l’intérêt du consommateur. Les avantages potentiels des structures d’entreprise alternatives pour les consommateurs peuvent notamment être les suivants :
- Plus de choix : Les consommateurs ont plus de flexibilité lorsqu’ils doivent décider du lieu où ils obtiendront des services juridiques et non juridiques.
- Prix réduits : Les cabinets utilisant une structure d’entreprise alternative réalisent des économies et des gains d’efficience au moyen d’économies d’échelle. Ainsi, lorsque différents professionnels appartiennent au même cabinet, les consommateurs peuvent acheter des services juridiques et non juridiques à moindre coût en raison de frais de transaction réduits.
- Meilleur accès à la justice : Les cabinets utilisant une structure d’entreprise alternative peuvent trouver plus facile de fournir des services aux consommateurs qui sont moins mobiles ou qui vivent dans des zones rurales ou éloignées.
- Service à la clientèle amélioré : Les cabinets utilisant une structure d’entreprise alternative peuvent facilement accéder à un financement externe et se spécialiser dans des compétences non juridiques au profit des consommateurs.
- Plus pratique pour les consommateurs : Un cabinet utilisant une structure d’entreprise alternative peut offrir des services aux consommateurs en un seul endroit, comme une assurance automobile et des services juridiques pour les demandes d’indemnités pour accident.
- Augmentation de la confiance de la clientèle : Les cabinets utilisant une structure d’entreprise alternative ayant une bonne réputation en matière de prestation de services non juridiques l’utilisent comme incitatif pour améliorer la qualité de leurs services juridiques et aider à maintenir cette réputation.
Voici quelques avantages potentiels de la structure d’entreprise alternative pour les fournisseurs de services juridiques :
- Augmentation de l’accès au financement : Sans structure d’entreprise alternative, les fournisseurs de services juridiques peuvent être confrontés à des contraintes concernant le montant des capitaux propres, principalement des capitaux empruntés, qu’ils peuvent lever. La structure d’entreprise alternative facilite l’expansion des cabinets au Canada et sur les marchés internationaux tout en augmentant l’efficacité des investissements pour les projets d’investissements à grande échelle.
- Répartition des risques : Plus il y a de propriétaires, moins il y a de risques pour chacun, ce qui permet également de réduire le taux requis de rendement du capital investi, de faciliter les investissements et d’offrir des prix plus bas.
- Augmentation de la flexibilité : Les structures d’entreprise alternatives donnent aux entreprises* non juridiques, comme les banques, les agents immobiliers et les compagnies d’assurances, la liberté de créer des synergies avec des cabinets d’avocats et d’offrir des services juridiques et connexes intégrés.
- Facilité accrue à embaucher et à fidéliser le personnel non-juriste très pertinent : Certaines règles standards pour les entreprises individuelles et les partenariats ne s’appliquent pas au personnel non juridique dans une structure d’entreprise alternative. Les cabinets utilisant une structure d’entreprise alternative peuvent récompenser de la même manière les avocats et les équipes non juridiques, ce qui les incite à embaucher et à fidéliser un personnel très pertinent.
- Plus de choix pour les professionnels du droit : Les structures d’entreprise alternatives peuvent créer plus d’occasions* et contribuer à une plus grande diversité pour les nouveaux professionnels du droit sous-représentés d’entrer dans un cabinet et d’y demeurer.
Les défis liés à la structure d’entreprise alternative
Certains professionnels du droit suggèrent que la création de partenariats multisectoriels, de pratiques juridiques incorporées ou l’affichage de cabinets d’avocats sur le marché présente des occasions d’amélioration des pratiques éthiques* dans les cabinets d’avocats. Ils peuvent y parvenir en facilitant le développement de nouveaux modèles de pratique morale dans le secteur juridique et l’établissement de meilleurs modèles pour réglementer la pratique d’un cabinet d’avocats. Il peut s’agir de s’assurer que les cabinets constitués en société disposent d’un système de gestion approprié et de confirmer qu’ils respectent leurs obligations professionnelles. D’autres membres de la profession juridique qui s’opposent aux structures d’entreprise alternatives s’inquiètent de trois problèmes principaux concernant la profession juridique :
- Les valeurs fondamentales;
- Le conflit d’obligations;
- La qualité du service.
Les valeurs fondamentales
Les opposants aux structures d’entreprise alternatives craignent une controverse au sujet des valeurs fondamentales de la profession juridique. Les valeurs fondamentales sont censées protéger les intérêts du client tout en garantissant la bonne administration de la justice. Les valeurs fondamentales de la profession juridique incluent la confidentialité du client, l’indépendance de l’avocat et l’évitement de tout conflit d’intérêts. Alors que les avocats doivent tirer un profit de leurs services, comme tout autre professionnel, ils partent du principe que leurs objectifs ne sont pas purement économiques, mais plutôt professionnels.
La responsabilité d’un avocat envers son client n’est surpassée que par celle des tribunaux. Tout manquement à la déontologie compromet la valeur de son investissement et de son existence professionnelle. Les responsabilités, la formation et l’expérience des avocats tempèrent leurs préoccupations privées en matière de profit. Les opposants aux structures d’entreprise alternatives ne peuvent s’attendre à ce que les non-avocats qui investissent en tant que propriétaires d’une structure d’entreprise alternative ne se trouvent pas dans une situation éthique où les préoccupations des clients sont plus importantes que les profits, ou qu’ils ne s’abstiennent pas d’influencer les politiques du cabinet afin de rechercher un rendement du capital investi approprié. Ils peuvent également percevoir les non-avocats non réglementés comme un risque pour les clients et pour l’administration de la justice.
Les non-avocats participant à titre d’investisseurs dans une structure d’entreprise alternative peuvent fausser la perception du public et compromettre l’intégrité des valeurs fondamentales. Les responsabilités d’un avocat les obligent à accepter des instructions qui peuvent ne pas être profitables, comme l’aide juridique. Le client veut être assuré que son dossier reçoit l’attention nécessaire, même dans ces circonstances. Si un cabinet réalise des bénéfices, certains douteront qu’il ait respecté son devoir envers le tribunal et que le devoir de l’entreprise envers son client l’ait emporté sur les investisseurs.
Le Barreau de l’Ontario avait des préoccupations concernant l’indépendance d’un avocat et sa liberté d’interagir efficacement avec son client, en son nom et pour son compte. Des questions se posent dans un environnement de structure d’entreprise alternative concernant cette préoccupation si l’avocat n’est qu’une petite partie d’une grande entreprise commerciale pour laquelle les dépendances interprofessionnelles sont essentielles à son bien-être. Dans le cas des cabinets cotés en bourse, la confidentialité des clients suscite de vives inquiétudes. Les commissions des valeurs mobilières appliquent des réglementations strictes aux entreprises publiques. Par exemple, une commission des valeurs mobilières pourrait avoir accès à des renseignements confidentiels sur un client au cours d’une enquête afin de mettre en œuvre son intérêt général et ses exigences réglementaires.
Le conflit d’obligations
Les conflits d’obligations sont particulièrement préoccupants dans le cas des modèles de structures d’entreprise alternatives cotées en bourse. La première obligation juridique d’un avocat est celle qu’il a envers la Cour, suivie d’un engagement secondaire envers son client. Cependant, le directeur du cabinet utilisant une structure d’entreprise alternative a le devoir d’agir de bonne foi et honnêtement dans l’intérêt du cabinet. Les actionnaires se fient au directeur pour qu’il s’acquitte de cette tâche et peuvent prendre des mesures lorsqu’il ne le fait pas. Il n’est pas difficile d’imaginer une situation dans laquelle un avocat d’un cabinet coté en bourse pourrait voir ses obligations envers son client ou la Cour entrer en conflit avec les intérêts des actionnaires ou les obligations de l’entreprise.
La qualité du service
Il existe un débat concernant la possibilité d’un service de moindre qualité avec une structure d’entreprise alternative. La manière dont la loi s’applique aux besoins précis d’un client peut varier considérablement en fonction de la présentation des circonstances. L’évolution vers la banalisation peut signifier qu’un client reçoit un service avec une approche plus générique qui ne répond pas à ses besoins. Le service peut être moins cher pour le client, mais il ne sera pas très utile. Le coût moins élevé peut également avoir une incidence sur le temps que l’avocat peut ou est prêt à accorder au client pour lui expliquer l’offre.